Défense en Afrique: Quelques pistes à méditer

Publié le par Jean-François CURTIS

 

De retour d'une riche mission à l'étranger, je souhaite partager avec vous d'indéniables constats qui constituent des défis sécuritaires à relever sur le continent africain.

Le premier constat : la gouvernance des armées est "malade"! En moins de deux mois, la Côte d'Ivoire, se retrouve bousculée par des mutineries sporadiques mais d'un caractère inquiétant et aux visages multiformes. En l'espace de plusieurs semaines, les efforts entrepris dans le cadre de la réforme du secteur de la Securité (RSS) ont volé en éclat. Les armées, reflets de la nation, se sont vues exposées par quelques groupes mécontents pour des raisons probablement légitimes mais mises sur la place publique au mépris des valeurs républicaines et d'une déontologie militaire. Plus que le motif, la forme de ces manifestations armées, est venue troublée la quiétude des populations. Nous l'avions déjà écrit, l'accent doit être mis sur la création de mécanismes de gouvernance du secteur de la Défense, garantissant un environnement assaini, de ce type d'événements qui décrédibilisent les efforts de la nation dans sa globalité, pour un redressement socio-économique viable. Pour que ces événements ne se reproduisent plus, il faut commander par l'exemple et surtout autoriser l'inspection générale des armées, à réaliser un maximum d'enquête et d'audits visant à identifier les points faibles de gouvernance et les axes de redressement à considérer. Il semble donc plus que pertinent, que les structures d'inspection et de contrôle des armées africaines, soient revalorisées et outillées pour agir comme baromètres de la gouvernance mais aussi comme outil de répression.

Le deuxième constat, concerne la coopération sud-sud en matière de défense. Sur ce point le constat est tout aussi édifiant, la coopération sud-sud est en marche et se porte bien. L'exemple qui reflète le mieux cette bonne santé, est l'engagement de l'Egypte dans la formation de pays africains, dans divers domaines notamment en protection rapprochée. L'Egypte se positionne comme un acteur incontournable du renforcement des capacités, dans des domaines pointus comme la lutte antiterroriste et le renseignement militaire. Le nombre de personnels étrangers formés en Egypte est impressionnant. De plus, faut-il noter les conditions de formation exceptionnelles, telles que la prise en charge intégrale des personnels en termes d'hébergement et de restauration. La diplomatie militaire égyptienne est très active et servirait de modèle indéniable aux pays frères du continent. Les échanges de bons procédés et d'expériences diverses devraient être à double sens pour permettre une juste coopération.

Le troisième constat est celui d'une lutte antiterroriste soutenue, qui requiert cependant quelques aménagements. Les initiatives régionales sont nombreuses et souffrent d'une mutualisation quasi-inexistante des moyens de lutte. Les groupes terroristes de la région sahélo-saharienne, sont dans une phase de repli et de défaites successives, qui nécessite une riposte forte et déterminée de la part des pays concernés, précisément ceux membres du G5 Sahel et ceux membres de la CEDEAO. Les pays expérimentés dans cette lutte à l'instar du Tchad devraient se lancer dans une dynamique de transfert de compétences et de renforcement de capacités, sans précédent pour appuyer les efforts des autres pays dans la lutte contre-terroriste. Certes, les moyens technologiques font souvent défaut, notamment les moyens ISR (Intelligence, Surveillance, Reconnaissance) car trop couteux, mais la coopération internationale devrait servir à renforcer ce volet technologique, d'une importance stratégique pour le recueil du renseignement et l'anticipation des menaces.

Le quatrième constat concerne l'émergence d'un extrémisme violent au sein des armées, autre que celui consacré à la radicalisation religieuse. Il importe de prendre en considération toutes formes d'extrémismes violents, qui impactent la quiétude des populations et qui mettent à mal les institutions des pays. En effet, toutes les causes d'un acte violent (psychologique, physique, sonore, etc..) constituent des freins au développement des pays africains. A titre d'exemple, les mutineries qui se produisent souvent sur le continent, ont un caractère nuisible qui affecte les populations du fait des nuisances sonores, visuelles, psychologiques et physiques qu'elles subissent. A ce titre, il conviendrait de réaliser des études sur les risques d'extrémismes violents au sein des armées africaines, pour identifier les causes potentielles de violence mais surtout traiter ces causes qui engendrent des troubles.

Enfin, le dernier constat est relatif à la cyber-défense qui souffre d'une insuffisante montée en puissance sur le continent. En effet, bien des pays africains sont assaillis par la cyber criminalité mais, ne mettent pas en place les outils de prévention et de répression nécessaires pour endiguer ce fléau. Le continent en pleine croissance doit se prémunir des cyber-attaques, qui nuisent aux systèmes d'information. Les outils de défense des pays africains ne sont pas aux normes de lutte de cyber-défense bien souvent du fait du coût onéreux des systèmes à déployer et de l'absence de vision sur le sujet. Il serait donc utile, d'élaborer une stratégie de cyberdéfense dans chaque pays africain pour endiguer la menace informatique essentiellement matérialisée par des intrusions, le vol de données, etc.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :