Côte d'Ivoire: toujours en phase post-crise?

Publié le par Jean-François CURTIS

 

La crise des soldats mécontents qui a récemment secoué plusieurs villes en Côte d'Ivoire, nous interpelle sur l'effectivité de la fin du processus post-crise. La phase post-crise a été officiellement décrétée mais les faits nous ramènent une fois de plus à la réalité. Le processus RSS entamé depuis plusieurs années, qui a été conduit de façon holistique a-t-il souffert en son volet gouvernance? En effet, à l'examen des revendications annoncées, les points essentiels tournent autour de question de gouvernance et plus précisément concernent l'évolution de carrière et des questions financières. Nous n'ambitionnons pas de passer en revue toutes les causes de cette crise, mais de mettre en exergue la nécessaire gouvernance.

Cette crise est avant tout la résultante de plusieurs années d'instabilité et de dispositions exceptionnelles prises en conformité avec le contexte qui prévalait à ce moment-là. La Côte d'Ivoire s'est engagée dans un processus de sortie de crise en 2007, puis dans une phase de reconstruction post-crise après 2011. Ainsi, le gouvernement a créé plusieurs mécanismes de sortie ou de reconstruction post-crise, permettant d'encadrer le relèvement du pays. La prise en compte des questions militaires, a constitué l'épine dorsale de l'ensemble des négociations. Comment comprendre qu'après tant d'années de réflexion et d'exécution de schémas conçus et endossés de tous, nous en soyons encore à ce stade de précarité sécuritaire?

Nous avions consacré un article le 25 septembre 2014, à la stabilisation post-crise et à ce qui nous semblait constituer les piliers d'un tel processus à savoir, la bonne gouvernance, la justice et la Réforme du Secteur de la Sécurité (RSS). Avons-nous pris suffisamment conscience de l'importance de la gouvernance du secteur de la défense dans la gestion de toutes les problématiques liées à la stabilisation post-crise? Tout processus de sortie de crise ou post-crise, nécessite une cohérence dans l'exécution et surtout une dimension inclusive.

A la lumière de cette crise, il semble que le volet "gestion des ressources humaines et profil de carrière" ai été insuffisamment pris en compte, eu égard aux revendications faites qui constituent une constance. La gouvernance du secteur de la défense garantit lorsqu'elle est effective, une équité, une éthique, une transparence, une intégrité et une responsabilité à l'ensemble de l'institution militaire permettant d'éviter ou de réduire tout acte (discriminatoire ou autre), pouvant conduire à des situations de mécontentement ou de soulèvement. Il est donc évident, que tout pays ayant connu une phase post-crise, demeure un état fragile tant que les piliers du relèvement socio-économique ne sont pas pris en compte.

Enfin, le gouvernement ivoirien a engagé des négociations avec les militaires mécontents pour une issue favorable à la paix. A cet effet, notre humble contribution citoyenne est la suivante : 1/ confier aux services d'inspection et de contrôle des armées, de réaliser un audit des questions de ressources humaines et de solde dans leur ensemble; 2/ Conduire de façon trimestrielle des enquêtes sur les conditions de vie des soldats et évaluer leur évolution; 3/ Mettre en place des mécanismes de gouvernance des questions de grades et de carrières des militaires; 4/ Créer ou redynamiser le bureau dédié au suivi des carrières des militaires; 5/ Créer le référentiel des emplois et compétences du ministère de la Défense; 6/ Mettre en mission les inspections et contrôles, pour assurer un minimum de veille en gouvernance, dans toutes les emprises militaires; 7/ Accélérer la mise en œuvre de la Loi de Programmation Militaire particulièrement en son volet infrastructures; 8/ Créer un programme permanent de promotion du civisme et des valeurs républicaines au sein des casernes militaires.

 

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