La ratatouille franco-africaine
La ratatouille, mot issu de l'occitan ratatolha, est une spécialité culinaire du sud de la France, elle est à la base un plat de légumes et contient des aubergines, des tomates, des courgettes, des oignons, des poivrons et de l’ail. "L'abréviation « rata » désigne en argot militaire un mélange de haricots et de pommes de terre, puis de légumes variés, de pain et de viande grasse. Le rata est en effet la cantine de base du militaire, simple et rapide à confectionner, avec étymologiquement un lien avec le verbe touiller, remuer pour mélanger."
Bref cher lecteurs, pourquoi cette introduction de nature culinaire? C'est simple, les récentes passes-d'armes entre Paris et Kinshasa lors du passage du Président français en Afrique Australe, dans le cadre du One Forest Summit, relèvent selon moi, de la "ratatouille" par leur intensité, leur texture, leur onctuosité et leur couleurs (MDR).
Je parle donc volontiers de ratatouille franco-africaine, riche en légumes de toutes sortes et en divers ingrédients que seule la relation entre la France et le continent africain peut autoriser. Ce savant mélange de légumes touillés, remués et mélangés, nous embarquent systématiquement dans une confusion sans précédent, au point que nous ne distinguons plus leurs saveurs.
Bon j'arrête ici cette analogie digne d'une envolée lyrique pour rappeler l'importance du partage de responsabilité face à l'histoire des nations.
Pour ma part et pour l'avoir répété régulièrement dans plusieurs de mes articles, il n'y a pas de plus grands responsables que nous-mêmes (africains) pour ce que nous sommes aujourd'hui. En effet, les faits de l'histoire nous enseignent la grande part de certaines nations occidentales dans le retard accusé par nos pays et l'existence de ce lien paternaliste et néocolonialiste qui caractérise les relations entre ex-colonisateurs et ex-colonisés au 21ème siècle, certes mais la victimisation s'arrêtera quand?
Le temps des réprimandes, des règlements de compte, des dénonciations et autres, est plus que jamais révolu. Le temps est à la redéfinition des relations entre nations, à l'action. La condescendance avec laquelle certains pays étrangers, présents sur le continent africain traitent nos états, par leur diplomatie, les liens économiques, les intérêts miniers, les enjeux militaires et j'en passe, est intolérable et doit être corrigée tel que l'a fait le Président de la RDC. Pour ceux qui doutent encore, il n'y a pas que la France à accuser éventuellement de paternalisme et de condescendance, la Chine et la Russie sont sur la voie. ouvrez les yeux et observez votre écosystème, vous vous en rendrez vite compte.
Je ne suis pas de ceux qui vivent dans le passé et qui sont restés figés dans leurs pensées en rejetant toute responsabilité sur la France ou autres pays pour leur souffrance et maux divers. Nous disposons aujourd'hui sur notre continent de toutes les ressources utiles à notre développement: ressources humaines, compétences, ressources minières, etc. Qu'est-ce qui nous empêche d'aller de l'avant sans constamment regarder dans le rétroviseur? La tentation de la victimisation permanente, le manque de cohésion africaine et le culte de l'irresponsabilité historique et collective. Voilà ce qui nous retient et nous n'avons aucune excuse!
C'est en cela, que je partage avec vous ma vision ci-dessous qui à mon sens, pourrait constituer une feuille de route pour des rapports repensés et équilibrés entre pays africains et le reste du monde:
1/ L'organisation d'un sommet de l'UA sur la définition d'une politique commune africaine vis à vis du monde. Cette politique serait un condensé des attentes de tous les pays africains et définirait une charte africaine des relations internationales. 2/ La tenue d'un symposium mondial sur les relations entre les pays africains et le reste du monde. Symposium organisé en Afrique, par les africains avec des financements africains. Ce symposium se ferait sur la base des résultats du sommet de l'UA. 3/ La mise en avant du principe de réciprocité dans les rapports avec les pays occidentaux. A titre d'exemple l'assistance technique réciproque. Autant nos pays pourraient accueillir des coopérants étrangers, autant des coopérants africains pourraient être accueillis dans des pays occidentaux. 4/ La nécessaire appropriation par les africains, des problématiques et enjeux qui concernent en premier lieu le continent. Tant que cette prise en main, cette autonomie, cette indépendance décomplexée, ne se mettra pas en marche alors l'assistanat technique et financier perdura bien au-delà de générations de jeunes africains qui souhaitent cette responsabilisation de nos politiques. 5/ Enfin, il est grand temps d'arrêter la politique de la "main tendue" et de construire une sincère solidarité africaine. Nombre de nos pays continuent à tendre la main pour recevoir de l'aide. Une aide indispensable pour certains qui malheureusement entretien ce lien de dépendance paternaliste sur fond d'assistance financière et d'aide au développement. Comment dire à celui qui vous finance en partie de ne pas vous dicter quoi que ce soit dans votre politique interne? Pourquoi ne pas développer l'entraide entre pays africains?
Enfin n'oublions pas que l'essentiel des stratégies d'influence des puissances étrangères actives en Afrique, reposent sur le principe de dépendance et non sur le principe de partenariat gagnant-gagnant. Il y a donc un déséquilibre entretenu à dessein. Aux africains de définir de nouvelles règles en matière de coopération et de partenariat.
N.B: Pour rappel, mes analyses n'engagent que moi et ne reflètent en rien une quelconque position officielle. J'interviens sur mon blog à titre privé et en qualité de stratégiste.