Ouagadougou: encore des tirs!

Publié le par Jean-François CURTIS

photo ouagadougou 02 mars 2018 (AFP)

Ouagadougou est une fois de trop ce vendredi 02 mars 2018, la cible d'attaques certainement terroristes eu égard aux déclarations faites par les autorités nationales. Les cibles stratégiques cette fois-ci étaient tant étrangères que nationales. En effet, c'est un groupe d'une dizaine d'individus qui a attaqué l'ambassade de France, l'institut français ainsi que l'état-major des forces armées burkinabés. La nature des cibles notamment l'état-major, a pu nous faire douter quant au caractère terroriste de ces attaques et a laissé planner la possibilité d'un coup de force militaire. Il n'en est rien il s'agit bel et bien de la troisième attaque terroriste d'envergure sur le sol burkinabé après celle de 2016 et 2017 au lourd bilan macabre (plus de 50 morts). Au moment où nous écrivons ce post, 06 assaillants semblent avoir été neutralisés selon les autorités burkinabés. Par contre, l'attaque est en cours à l'état-major où le bilan provisoire est de 05 décès du côté des forces burkinabés.

La vague de violence et de terreur se poursuit dans la sous-région et la capitale burkinabé est une cible privilégiée qui, avec cette énième attaque démontre la fragilité de nos états africains face à cette menace mais surtout nous invite à resserrer les rangs et à mieux anticiper les risques et davantage se préparer à la riposte comme le font avec détermination les forces burkinabés en ce moment dans leur capitale. En effet, les allégeances qui naissent entre groupes armés terroristes dans la région du Sahel, traduisent une dynamique de mutation continuelle de la menace. Ce mois-ci, MENASTREAM, annonçait l'allégeance de Katiba et Ansardine à l'Etat Islamique au Grand Sahara (EIGS). Une allégeance de plus, pour renforcer les capacités d'opération des groupes armés.

L'attaque osée et suicidaire de l'état-major burkinabé, est un signal fort à l'endroit des populations et des dirigeants car, frapper le cœur du dispositif militaire témoigne de la détermination et du degré de violence de l'acte.  A ce jour, en dehors du Mali qui connaît ce type d'actions contre les forces de sécurité et militaires, ni le Burkina, ni la Côte d'Ivoire n'ont été frappés dans leur dispositif sécuritaire de la sorte. Ce sont les signes d'une escalade majeure et d'une extension du mode opératoire malien au Burkina, pour l'instant. Nous invitons donc les autorités ivoiriennes à anticiper toute attaque, en multipliant les contrôles à compter de ce jour sur l'ensemble du territoire et à renforcer les dispositifs de sécurité sur chaque site stratégique particulièrement l'état-major, les camps militaires et de gendarmerie, les ambassades étrangères etc.

Pour rappel, comme indiqué dans notre post du 14 aout 2017, "il est primordial qu’au niveau institutionnel et législatif, la stratégie nationale de lutte contre le terrorisme soit adoptée par le conseil national de sécurité puis présentée à l’assemblée nationale. Cette stratégie une fois adoptée, viendra renforcée l’action des forces intervenant dans cette lutte et apportera davantage de cohérence au dispositif actuel. 

D’ailleurs, le caractère inclusif et transversal de cette lutte n’est plus à démontrer. C’est en cela, qu’il est urgent d’outiller tous les acteurs intervenant dans ce combat insidieux, notamment les agents des Eaux et Forêts, qui sont responsables de la surveillance des massifs forestiers et qui devraient à ce titre, bénéficier de moyens de mobilité, de matériels et de l’armement conséquents, pour identifier et combattre toutes activités suspectes.

Aussi est-il fondamental, de poursuivre les exercices et simulations pour maintenir les unités en phase de veille et avec un minimum de maintien en condition opérationnelle. Nous recommandons donc que dans cette période de forte menace terroriste, nos forces multiplient les exercices de libération de prise d’otages ainsi que les patrouilles dans les villes concernées.

En outre, est-il important de maintenir la montée en puissance des unités spécialisées en matériels et équipements idoines. Nous n’oublions pas le volet formation, qui demeure le socle de toutes actions. 

De plus, nous soulignons une vérité immuable qui réside dans le partage d’expériences entre pays victimes du terrorisme. Il est crucial que les forces burkinabés et ivoiriennes partagent leurs expériences liées aux différentes attaques, pour mieux appréhender de futures tragédies. La force des pays ciblés, reste leur solidarité dans la souffrance face cette menace. La mutualisation de leurs moyens est bien entendu inévitable."

 Enfin, N'oublions pas que la terreur frappe au moment où l'on relâche l'attention. Le terrorisme se nourrit des failles de ses victimes et particulièrement de l'absence de vigilance. Nous avons lors d'articles précédents, suffisamment couverts les faiblesses en matière de lutte contreterroriste, il est grand temps que des mesures solides et efficaces soient exécutées sans répit. Cependant, la future installation du centre sous régional de lutte antiterroriste en Côte d'Ivoire pourrait en plus d'être un élément de dissuasion, être une forme de vulnérabilité, car exposant le pays à des représailles. Nous ne saurions clore notre contribution sans souligner le courage et le professionnalisme des forces de sécurité et de défense du Burkina et saluer la mémoire des victimes.

 

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