Eurosatory 2016: leçons apprises

Publié le par Jean-François CURTIS

Eurosatory 2016: leçons apprises

Du 13 au 17 juin derniers, s'est tenu le salon de l'armement Eurosatory 2016. Cet événement est sans aucun doute, le plus important de l'année pour ce qui relève des systèmes d'armes, des équipements et de matériels militaires. Pratiquement tous les industriels de l'armement s'y retrouvent, pour vendre leurs solutions ainsi que développer leurs réseaux. Il est à noter, que ce rendez-vous exceptionnel par sa dimension et sa richesse, attire tous les ans des milliers de visiteurs.

Eurosatory en chiffres c'est : 1 572 exposants de 56 pays, 55 500 visiteurs de 152 pays, 1 018 journalistes accrédités, 213 délégations officielles de 94 pays représentant 827 délégués VIP, 13 ministres, 23 vice-ministres et secrétaires d’Etat, 25 directeurs nationaux d’armement et 19 Chef d’Etat-Major des armées.

Le cru 2016 a confirmé la montée en puissance des industriels de la défense dans le monde et l'intégration des hautes technologies. En effet, plusieurs entreprises spécialisées dans la production militaire ont exposé leurs produits et solutions qui redoublent d'une grande ingéniosité à l'instar du Vaylon Pegase Mark 2, buggy volant.

Du côté des grands groupes présents, rien de surprenant, Thales, IMI, Nexter, Honeywell, Norinco, Safran et bien d'autres étaient présents. Des entreprises moins influentes étaient présentes, notamment, TR Equipement, Vaylon, Atermes, Tar Ideal Concepts et Magforce exposaient également. Enfin, il faut noter la faible participation d'industriels africains du secteur de la défense dont certains étaient absents, tel que le géant Denel.

En effet, les exposants africains étaient les grands absents du salon Eurosatory mais d'un point de vue des visiteurs, ils étaient nombreux comme à chaque rendez-vous. Il faut dire que les menaces étant de plus en plus insidieuses sur le continent africain, il semble cohérent que les états cherchent des solutions adaptées et sur mesure à leurs besoins en matériels, équipements et systèmes d'armes pour y faire face. Cette nécessité devrait se traduire par le développement d'une industrie de la défense africaine à l'instar de l'Egypte et de l'Afrique du Sud. Cependant, une rationalisation des acquisitions est une priorité car Eurosatory met en avant des technologies avancées qui bien souvent sont bien au-delà des capacités des armées africaines et de leurs besoins.

En outre, l'absence de loi de programmation militaire ou sécuritaire dans biens des pays africains, expose les états à des acquisitions désordonnées et peu cohérentes avec leurs contextes géostratégiques. D'ailleurs la Côte d'Ivoire est un modèle en la matière compte- tenu du vote d'une loi de programmation militaire en janvier 2016, qui rationalise les dépenses et investissements militaires, en les programmant sur 4 ans. La justification d'un tel outil de mise en cohérence des besoins avec les solutions, n'est plus à faire. Le marché de l'armement en Afrique est autant qu'ailleurs, entaché d'irrégularités et d'abus aux conséquences coûteuses, ce qui ouvre la voie à des ONG internationales, telle que Amnesty International qui dénonce en parlant du salon, une "vitrine de la répression mondiale" et souligne notamment la promotion d'armes russes, ainsi que la publicité d'équipements français, destinés à être vendus à des régimes répressifs.

Enfin, les leçons que nous tirons de cet événement majeur sont de plusieurs ordres: 1/ D'un point de vue de son organisation, cet événement est un modèle à répliquer dans le monde, à l'instar du salon ShieldAfrica de la sécurité qui se tiendra en 2017 à Abidjan. A ce sujet, la communication sur ShieldAfrica devrait être davantage offensive, pour enregistrer davantage d'exposants et attirer des visiteurs de tout horizon. 2/ D'un point de vue de la sécurité de l'événement, en dehors d'insignifiants incidents, rien n'est venu perturber sa tenue. En effet, dans un contexte de menace terroriste, il faut reconnaître que la sécurité du salon était assurée avec brio. 3/ Relativement à la participation des entreprises africaines de la défense, il est à noter l'impérieuse nécessité pour les états africains d'encourager la création d'entreprises de production militaire pour générer des emplois mais aussi des revenus conséquents et ainsi devenir acteurs incontournables dans l'armement mondial. 4/ Au titre des contrats signés durant le salon ou à venir, nous rappelons l'importance d'une cohérence dans les acquisitions pour garantir une efficacité dans la riposte face à la menace. 5/ A l'instar des pays nordiques européens qui s'unissent pour développer une industrie de défense commune, les états africains pourraient unir leurs forces pour mutualiser les moyens et ainsi développer plusieurs industries de défense sous-régionales.

Par Jean-François CURTIS

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