Consolidation du développement en Afrique: Les sept stratégies.

Publié le par Jean-François CURTIS

"Génération et Alternance"
"Génération et Alternance"

L'impasse politique que traverse le Burkina Faso depuis le 30 octobre dernier, nous interpelle à plus d'un titre. D'abord en tant que pays frontalier puis en tant qu'africain soucieux du devenir de nos jeunes nations. Plusieurs pays en 2015, organiseront leur scrutin présidentiel dans un climat tendu et avec en mémoire les conséquences de la crise au Burkina Faso parmi lesquelles, la démission de M. Compaoré, les multiples présidents auto-proclamés et l'incertaine transition engagée.

L'enjeu aujourd'hui, pour tous les pays africains et particulièrement pour toute une génération de présidents et d'aînés est l'intégration de la notion de "changement en vue du développement de nos jeunes pays". En Côte d'Ivoire par exemple, la notion qui a le vent en poupe est "l'émergence". L'émergence d'un pays est son développement dans toutes ses dimensions et particulièrement conformément aux exigences de bonne gouvernance.

Il ressort de cela qu'il est impérieux pour nos dirigeants, d'évoluer dans l'ère du temps qui est celui d'une vague incessante de changement majeur, tant au niveau des mentalités que des comportements.

Sept stratégies ou préalables, nous semblent alors inéluctablement imbriquées pour garantir un bon niveau de développement des pays africains :

1/ L'acceptation de l'alternance démocratique est le socle de tout développement économique durable! En effet, toute négation de la démocratie est au 21ème siècle un gage de désordre et d'instabilité. Le constat est édifiant, les africains sont plus que jamais "éclairés", "connectés" et avides de liberté dans sa globalité. Un modèle de démocratie africaine est plus que jamais une nécessité pour adapter les réalités locales à la définition originelle. L'on pourrait d'ailleurs élaborer un modèle de démocratie africaine à partir de la synthèse des forces et faiblesses de cinq pays considérés comme étant des exemples à savoir: le Ghana, le Sénégal, le Cap-Vert, l'Afrique du Sud et le Maroc.

2/ L'acceptation du "passage de témoin générationnel" à de jeunes leaders "connectés"! Sur ce point il faut dire que les aînés ont encore du mal à faire confiance aux jeunes générations pour des raisons qui bien souvent ne sont plus d'actualités. Le développement d'une nation se fait par la sagesse de ses aînés et la fougue de sa jeunesse! Intégrer les générations plus jeunes, dans le débat politique et les préparer à diriger est un gage de transition générationnelle réussie. De plus en plus, les jeunes africains accèdent à des responsabilités longtemps réservées à des personnes d'un certain âge dans l'administration. Le renouvellement générationnel apporte entre autre avec lui, fraîcheur, fougue, ambition, ouverture d'esprit, adaptabilité et compétitivité. La relève doit donc être préparée et introduite très tôt, pour asseoir un développement viable et qui corresponde aux exigences de ce siècle et des siècles à venir.

3/ L'acceptation des règles de bonne gouvernance est primordiale! A ce sujet, il faut dire que seuls quelques pays africains se distinguent en la matière tel que le Botswana et l'Ile Maurice. Bafouer les principes de base que sont l'intégrité, la transparence, l'éthique et la "redevabilité" constitue un risque pour la crédibilité de toute démocratie digne de ce nom. Il serait donc judicieux que chaque pays africain dispose d'un organe chargé de veiller au respect des principes cités précédemment et chargé de sanctionner tout manquement.

4/ Le rejet de toute forme de violence anticonstitutionnelle. Ce point est crucial, car il met le doigt sur la question des coups-d'états militaires à répétition sur le continent et des tentatives de maintien anticonstitutionnel! Ce rejet, pourrait se matérialiser par la signature d'une charte d'inviolabilité de la constitution, par tous les acteurs politiques d'un pays donné. Toute intention ou décision anticonstitutionnelle est à proscrire. Les constitutions des pays pourraient aussi intégrer une disposition qui rejette catégoriquement toute prise de pouvoir par un militaire. Peu importe le motif, un militaire ne doit en aucun cas s'imposer comme président au prétexte d'une vacance de pouvoir.

5/ L'instauration d'un climat de sécurité favorable au développement du pays. Pour se faire, plusieurs mécanismes et dispositions doivent être mis en place. Les pays africains ayant des difficultés à assurer la sécurité de leurs populations du fait de la déliquescence de leur système de sécurité , pourraient faire appel à des sociétés privées de sécurité, spécialisées dans le conseil et l'intervention ponctuelle. Plusieurs sociétés existent dans ce domaine et ont fait leurs preuves sur de nombreux théâtres d'opérations dans le monde. La Réforme du Secteur de la Sécurité (RSS) devrait également être une priorité pour les gouvernements africains soucieux de redorer le blason de leurs forces et soucieux de renforcer leurs capacités. La RSS lorsqu'elle est cohérente et inclusive permet de restructurer les forces chargées de la sécurité sur la base des grands principes de bonne gouvernance. Enfin, le renforcement des capacités des services de renseignement viendrait consolider l'édifice "sécuritaire" en anticipant les menaces.

6/ La mise en place de mécanismes de développement humain tangibles. En effet, l'Homme est au cœur du développement, il est à la fois acteur et témoin de son propre développement. Ainsi, le développement d'un pays, ne peut se faire en dehors du bien être de ce dernier. L'Indice de développement Humain (IDH) du PNUD, est une bonne boussole de développement qui sur la base de plusieurs indicateurs, donne la cartographie du développement humain dans le monde. Le constat est édifiant, les pays les moins démocratiques sont ceux dont l'IDH est le plus faible. Quelques exceptions existent mais pour l'essentiel, le développement humain repose sur une démocratie tangible. Les pays à fort indice de développement humain sont les plus démocratiques.

7/ "La transformation mentale" des citoyens à travers une culture civique bien ancrée dans les esprits. Les grandes nations démocratiques se sont construites certes sur plusieurs décennies mais elles ont surtout réussi le pari du développement grâce à une conscience collective de la notion de "patrie". C'est donc le civisme, qui est le "ciment" du développement des grands pays démocratiques. Cette question de civisme, s'applique aussi, aux régimes peu démocratiques mais qui réussissent leur développement tel que la République Populaire de Chine. En effet, le citoyen doit se considérer comme l'un des maillons de la chaîne du développement de son pays. Cette "conscience citoyenne" appelle un "devoir citoyen". Malheureusement dans bien des pays africains, la culture civique et patriotique fait défaut et explique aussi l'incapacité pour ces pays à aspirer à un développement durable.

Le développement des pays africains implique donc un ensemble de conditions tant politiques que socio-économiques. Cette proposition de sept stratégies en vue du développement, n'est donc pas exhaustive. Chacun d'entre nous, à son humble niveau et par devoir, pourrait identifier d'autres conditions au véritable développement durable des pays africains.

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